Bassin d’Orange : La Namibie face à ses choix avant la décision d’investissement de 2026

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À un an de la décision finale d’investissement sur le gisement Venus, la Namibie entre dans une phase cruciale. Après les grandes annonces, place désormais à la mise en œuvre. Ports, contenu local, permis environnementaux : trois chantiers décisifs qui détermineront si le pays transformera son potentiel pétrolier en réalité économique.

C’est le message que fait passer Tom Alweendo, fondateur du cabinet Alvenco Advisory et ancien ministre namibien des Mines et de l’Énergie, dans une tribune publiée cette semaine. Selon lui, le pays doit conjuguer discipline et pragmatisme pour franchir cette étape décisive sans s’engager dans des dépenses prématurées.

Ports : modularité plutôt que mégaprojets

TotalEnergies, opérateur du champ Venus, a repoussé sa décision finale d’investissement (FID) à 2026 et prévoit un développement plus modeste dans un premier temps. Dans ce contexte, la logistique devient un test de crédibilité.

La modernisation du port de Lüderitz — essentiel pour soutenir les opérations offshore — a été suspendue, et un appel d’offres pour la base d’approvisionnement a été annulé quelques jours après son lancement. Une incertitude qui inquiète les opérateurs, pour qui chaque jour de retard se traduit en millions de dollars de coûts supplémentaires.

Alweendo plaide pour une approche échelonnée et modulaire, calée sur le rythme réel des opérations : « Pas de mégaprojet, mais une livraison progressive liée à l’activité effective des plates-formes. »
Il propose la publication d’un calendrier de construction sur 12 mois, signé conjointement par Namport et les ministères concernés, et le réinvestissement des redevances portuaires dans les travaux.

Des partenariats public-privé ciblés pourraient garantir la première phase, tandis que les opérateurs coordonneraient leurs plannings pour lisser les pics d’activité. L’exemple de Baker Hughes, qui a implanté une base logistique à Walvis Bay, illustre selon lui le type d’investissement efficace et partagé que la Namibie doit encourager.

Contenu local : transformer les promesses en capacités

Le gouvernement namibien élabore actuellement une politique nationale de contenu local dans le secteur pétrolier et gazier. Pour Tom Alweendo, c’est une étape essentielle — à condition d’éviter les formalités sans effet.

Il recommande trois leviers : Des objectifs transparents et progressifs par catégorie de services (logistique, santé, environnement, fabrication). Une taxe de formation modeste (1 % de la valeur du contrat) destinée à des centres certifiés et indépendants. Des normes strictes de paiement rapide aux PME (15 jours maximum) assorties de pénalités.

Pour les opérateurs, il appelle à plus de prévisibilité et de transfert de compétences : annoncer les appels d’offres à l’avance, adapter la taille des lots aux capacités locales et détacher des ingénieurs dans les entreprises namibiennes.

Permis et environnement : rapidité et légitimité

Les récents litiges en Afrique du Sud, où la Haute Cour du Cap-Occidental a annulé une autorisation environnementale pour les blocs offshore 5/6/7, rappellent le risque que représentent des processus bâclés.

La Namibie doit, selon Alweendo, intégrer la rigueur environnementale dans son calendrier : évaluation cumulative des impacts le long de la côte sud, modélisation des marées noires transfrontalières et financement d’une capacité d’examen indépendante pour épauler les régulateurs.

Il propose aussi la création d’un guichet unique des permis pour le bassin d’Orange, assorti de délais légaux de traitement et de tableaux de bord mensuels publics. « La rapidité et la rigueur ne sont pas opposées, elles se renforcent », souligne-t-il.

La fenêtre de crédibilité se referme

Dans un contexte de croissance revue à la baisse (3,3 % en 2025 contre 4,5 % initialement prévus), la réussite du bassin d’Orange deviendra un test de gouvernance.

« Les investisseurs réagiront aux preuves, pas aux promesses », prévient Alweendo. Si la Namibie parvient à démontrer, d’ici la mi-2026, une gestion cohérente de ses infrastructures, de son contenu local et de ses permis, le pays pourrait consolider la confiance et attirer des capitaux stables.

À défaut, « les fonds mobiles iront ailleurs — en Guyane, au Brésil ou au Nigeria ».

Un cap clair : construire le nécessaire, prouver la fiabilité

Pour Tom Alweendo, le succès ne se mesurera pas à l’ampleur des annonces, mais à la fiabilité des livraisons : « Notre ambition doit être disciplinée : ne construire que ce qui est nécessaire pour l’évaluation et le développement initial, et garder la flexibilité pour l’après-FID. »

Un message de prudence, mais aussi de confiance : la Namibie a la possibilité d’écrire l’un des rares récits africains de développement pétrolier mené avec rigueur, transparence et tempo maîtrisé.

Aimé Kouassi


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