Paiements numériques en Afrique de l’Ouest et du Centre : Innovation, inclusion et régulation

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Contrairement aux perceptions habituelles, cette révolution ne naît pas de la technologie seule, mais de la vision anticipatrice des autorités monétaires africaines. La BCEAO et la BEAC ont su identifier les besoins de leurs populations en élaborant des cadres réglementaires innovants.

L’Instruction n°008-05-2015 de la BCEAO sur la monnaie électronique reste une référence mondiale. Au lieu de brider l’innovation, elle a créé un environnement propice à l’expérimentation contrôlée. L’Instruction n°001-01-2024 affine encore cette approche, démontrant l’adaptation constante de la régulation aux évolutions technologiques.

La BEAC illustre également cette vision pragmatique. L’interopérabilité des cartes bancaires et du mobile money instaurée dès 2020 témoigne d’une approche équilibrée entre anticipation et pragmatisme. Les systèmes SYGMA et SYSTAC s’inscrivent dans cette même logique : construire dès aujourd’hui l’infrastructure de demain.

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Selon Bart Willems, CEO du groupe OMOA , au sein du groupe OMOA, ils  mesurent quotidiennement l’impact de cette convergence entre innovation et attentes sociales. Après vingt années de présence continentale, notre groupe a accompagné la mutation des comportements financiers de millions d’Africains. L’adoption fulgurante frappe par sa rapidité : 23 533 milliards FCFA transitent désormais par le mobile money dans l’UEMOA, surpassant les flux bancaires classiques.

Cette appropriation massive répond à des difficultés tangibles : files d’attente sans fin, agences bancaires distantes, tarifs inaccessibles. La technologie a simplement permis de contourner ces barrières structurelles.

Nos centres de traitement, certifiés selon les standards internationaux les plus exigeants (PCI-DSS, Visa, MasterCard), gèrent aujourd’hui des volumes inimaginables il y a quelques années. Cette montée en puissance s’accompagne d’exigences accrues en matière de fiabilité et de sécurité.

L’infrastructure comme socle de l’écosystème

Le déploiement en 2024 du système de paiement instantané interopérable de l’UEMOA constitue une étape décisive. Fonctionnant en continu, ce système concrétise la vision d’une Afrique financièrement unifiée. Derrière cette réalisation technique se cache un travail patient de construction d’une infrastructure solide.

Le GIM-UEMOA, fort de ses 130 membres, exemplifie cette démarche collaborative. En partageant les investissements et en harmonisant les protocoles, il permet à des acteurs de diverses tailles d’accéder à une infrastructure de rang mondial.

Notre filiale Operator Payment System, inaugurée à Lomé en 2022, s’inscrit dans cette logique. Premier centre privé certifié PCI-DSS et PCI-CP en Afrique subsaharienne, il prouve que performance technique et ancrage local se complètent. Le choix du Togo reflète la vision d’une Afrique devenant hub technologique.

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L’inclusion financière se construit progressivement, segment par segment. Les analyses BCEAO révèlent des comportements variés selon les profils : micro-entrepreneurs et producteurs agricoles affichent des préférences distinctes dans l’utilisation des canaux mobiles pour leurs transactions.

Les solutions d’Agency Banking développées par l’ensemble des acteurs illustrent cette personnalisation. Le réseau déployé dans l’espace UEMOA, particulièrement dense en zones rurales, répond à une demande de proximité que les réseaux bancaires traditionnels satisfont difficilement.

Cette stratégie produit des résultats concrets : le taux d’inclusion financière dans l’UEMOA progresse de 47% en 2016 à 72,3% en 2023. Au-delà des statistiques, c’est la transformation concrète des vies qui guide les acteurs du secteur : ce commerçant acceptant enfin les paiements électroniques, cette productrice épargnant via son mobile, cet entrepreneur accédant au crédit grâce à son historique transactionnel.

La confiance comme prérequis absolu

L’expansion des paiements numériques repose sur un pacte de confiance délicat. Les populations africaines confient leurs ressources à des systèmes qu’elles ne maîtrisent pas entièrement. Cette responsabilité engage tous les acteurs du secteur.

La cybersécurité dépasse ainsi l’impératif technique pour devenir un engagement éthique. Nos investissements dans l’intelligence artificielle pour détecter les fraudes, nos certifications internationales, nos protocoles de protection des données répondent à cette obligation.

Les Observatoires de la Qualité des Services Financiers, déployés dans plusieurs pays, participent activement à cette construction de la confiance. Ils rappellent que chaque transaction concerne un individu avec ses aspirations et ses inquiétudes.

L’éducation financière demeure notre défi collectif majeur. Les dernières études BCEAO mettent en évidence des réticences importantes à l’endettement chez certains segments, notamment les femmes, les jeunes et les producteurs agricoles. Le secteur mesure le travail restant à accomplir dans ce domaine qui dépasse largement les seules entreprises privées.

La collaboration comme modèle d’avenir

L’expérience de notre groupe dans l’écosystème des paiements démontre qu’aucun acteur, même dominant, ne peut transformer seul un écosystème entier. La collaboration constitue une nécessité, non un choix.

Nos partenariats universitaires, comme celui établi entre OPS et l’Université de Lomé, illustrent cette philosophie. Former les talents de demain représente un investissement dans la durabilité du secteur.

Cette approche collaborative englobe les relations avec les régulateurs. Plutôt que de subir la réglementation, les acteurs innovants contribuent à son élaboration. Les retours d’expérience terrain alimentent les réflexions des autorités monétaires, créant une dynamique vertueuse d’amélioration continue.

Les défis de demain se profilent

Trois enjeux majeurs structureront les années à venir. Premièrement, l’harmonisation réglementaire entre les espaces UEMOA et CEMAC. Les récentes concertations entre gouverneurs des banques centrales esquissent des perspectives encourageantes, mais le parcours reste exigeant.

Deuxièmement, la problématique de l’identité numérique. Comment concilier sécurité transactionnelle et accessibilité des services ? Cette équation complexe nécessite une résolution collective du secteur.

Troisièmement, l’infrastructure physique constitue encore un frein. Connectivité instable, accès énergétique limité : ces contraintes pèsent sur le déploiement des services numériques. Nos investissements dans l’alimentation solaire des distributeurs automatiques démontrent l’existence de solutions, mais elles requièrent des ressources importantes.

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 « Vingt ans après nos premiers pas sur le continent africain, l’optimisme demeure entier. Les paiements numériques ont déjà transformé l’existence de millions d’Africains et continueront sur cette voie, à condition que l’écosystème préserve cet équilibre délicat entre innovation, inclusion et conformité qui caractérise le modèle africain. L’avenir du continent se joue également dans cette capacité à développer ses propres solutions financières, enracinées dans ses réalités et portées par ses ambitions », a conclu Bart Willems, CEO du groupe OMOA.

Julien Koffi


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